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Profitant ce mardi 20 novembre de cette rencontre trimestrielle entre la cour suprême et les magistrats des juridictions de fond, le ministre Marie-Elise Gbedo a laissé parler son cœur. C’était en dehors de la cérémonie officielle d’ouverture. Sans être une donneuse de leçon, elle souhaite qu’au cours de cette rencontre, les juges de fond soutiennent la jeune génération qui est en train d’apprendre.
« …Depuis que je suis Garde des sceaux, je m’applique à rappeler aux magistrats de ne pas oublier que je suis moi aussi de la famille judiciaire, parce que j’ai l’impression qu’à un moment donné, on a oublié que j’appartiens à cette famille à laquelle je tiens beaucoup et pour laquelle je me bats sincèrement. J’avoue que ce dialogue que nous allons instaurer entre la Cour suprême et des juridictions de fond est vraiment la bienvenue, parce que j’ai l’impression qu’il y a un défaut de communication. Et en ce moment, on sent que ça ne va pas ; et que je pense que les juges de fond doivent faire un travail par rapport à la jeune génération qui est en train d’apprendre. Sans être une donneuse de leçon, j’ai le sentiment que la déontologie a foutu le camp de notre grande famille judicaire. Et le mal est très profond. Si on n’y prend garde, j’ai peur pour notre justice. Je sais que j’ai eu à dire des choses très dures, mais ce n’était pas pour faire du mal à qui que ce soit. C’est pour booster notre réveil. Ça ne va pas à la justice et ça ne va pas avec certains magistrats. Je ne vais pas rentrer dans les détails parce que l’obligation de réserve m’oblige à ne pas le faire. Mais je dis encore une fois que ça ne va pas. Quand on parle, on ne parle pas en l’air comme ça. Il y a des attitudes de certains magistrats qui ne nous honorent pas du tout et moi, en tant que Garde des sceaux, je le ressens très mal. Il y a tellement d’exemples que si je me mets à vous les exposer avec des noms à l’appui, vous n’en reviendrez pas. Et ça, je crois qu’il faut tirer la sonnette d’alarme. Il faut vraiment qu’on tire la sonnette d’alarme et il faut qu’un réarmement moral se fasse. Je le demande vraiment à tout le monde, parce que j’ai même l’impression que ceux qu’on appelle les doyens ou bien les aînés sont en train d’abandonner la maison. Ils sont en train de devenir des défaitistes par rapport à la jeune génération (…) J’ai eu l’occasion de discuter avec bon nombre d’entre vous que je pratique, que j’aime, que j’adore et en qui je crois sincèrement (…) Nous glissons effectivement vers une certaine injustice de la justice. Mais je ne perds pas espoir étant de cette famille. Aujourd’hui, je perds mon portefeuille de Garde des Sceaux, je vais aller où ? Je reprends ma robe noire… »
Propos recueillis par
pT. G. R
(Br Ouémé/Plateau)
Source: Le Matinal du 21 novembre 2012